THE LAST TEMPTATION OF CHRIST (La dernière tentation
du Christ (1988)
L'histoire Le film traite de la dernière
période de la vie de Jésus Christ depuis sa rencontre avec
les apôtres et la crucifixion. Jésus (Willem Dafoe) est présenté
comme un simple charpentier qui fabrique les croix utilisés par
l'occupant romain pour les crucifixions. Ses rencontres avec Judas (Harvey
Keitel) puis avec Marie-Madeleine la prostituée (Barbara Hershey),
le poussent à prendre conscience de sa destinée qu'il refuse.
S'en suivent les épisodes célèbres de la fin de sa
vie, entre les premiers sermons, sa rencontre avec Jean le Baptiste, les
miracles, sa colère contre le pouvoir de Jérusalem, son arrestation
et le jugement de Ponce Pilate (David Bowie). Conduit sur le Golgotha,
il sera crucifié sous le regard des femmes qui ont suivi son chemin.
A l'instant de sa mort, un ange sous les traits d'une petite fille lui
apparaît et lui annonce que sa souffrance peut finir.
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Impression J'éprouve beaucoup de difficultés
à parler de The last temptation of Christ. Comment rester
insensible à tous ces mouvements intégristes qui ont salit
le film jusqu'à faire des blessés dans ces endroits merveilleux
que sont les salles obscures. Comme souvent pour ce qui concerne ces films
précédés d'une odeur de soufre, ceux qui s'acharnent
dessus ont toujours refusé de le voir. Je me souviens qu'à
l'époque de sa sortie en salle, j'avais été fortement
choqué par l'acharnement détestable que ceux qui croient
détenir la vérité avait exercé sur le film,
de sorte que, allant le voir, je ne pouvait pas ne pas l'aimer. Avec le
recul nécessaire, et quelques visions plus tard, je dois dire que
ce film, tant désiré par le cinéaste et depuis tant
d'années, n'est pas totalement réussi.
Le film est tiré du roman de Nikos Kazantzakis,
et souhaite traiter de l'aspect humain de la nature divine de Jésus.
Scorsese a pris le parti du réalisme extrême, loin des péplums
d'hollywood qui ont bercé son enfance. Le Christ nous est présenté
comme une victime de sa destinée, refusant d'admettre qu'il est
le Messie. Son véritable chemin de croix commence dès lors
qu'il part sur les chemins prêcher la parole de Dieu. Dans un monde
de violence, il apparaît comme un fou aux yeux de tous, même
ceux de ses plus fidèles compagnons. La seule personne qui arrive
à le comprendre, Marie-Madeleine, représente un mal encore
plus grave que celui de Jésus. Lorsqu'il aura choisit de mener enfin
une vie d'homme, une vie normale à ses yeux, elle le recueillera
dans sa couche, avant de disparaître, frappée par le pouvoir
divin. Ce personnage, composé par un Willem Dafoe exceptionnel,
nous émeut par son extrême sensibilité, puis nous frappe
par la terrible souffrance qu'il s'inflige. Jamais un film ne nous aura
montré une vision aussi compatissante pour ce personnage. A l'inverse,
le personnage de Judas (Harvey Keitel, parfait comme à son habitude),
souvent représenté comme le vilain petit canard de l'histoire,
est, ici, celui qui éprouve le plus d'amour pour Jésus, et
celui qui l'aidera à accepter sa destinée. C'est cette balance,
peu conventionnelle, qui a certainement le plus déstabilisé
les règles établies. Alors oui, on peut comprendre le choc
qu'ont pu avoir des milliers de catholiques lorsque Jésus descend
de sa croix, mais c'est aller vite en besogne que de condamner le film
sans y voir le plus formidable cri d'amour pour Jésus, loin de l'académisme
frileux du Jésus de Nazareth de Franco Zeffirelli (biographie
"autorisée" par le Vatican).
Depuis 1972 (c'est Barbara Hershey qui lui avait
donné à lire le livre après le tournage de Boxcar
Bertha), le cinéaste éprouve beaucoup de difficulté
à monter le projet. En 1983, alors que le budget est pratiquement
fixé, les repérages en Israël effectués, le tournage
est de nouveau ajourné (pour rebondir, Scorsese réalisera
à toute allure After Hours). Finalement, ce n'est que le
12 octobre 1987 que le tournage démarre enfin au Maroc. Pendant
toutes ces années d'attente, de multiples version du scénario
sont écrites par Paul Schrader. Est-ce l'interminable gestation
du film, l'envie trop importante de Scorsese de le réaliser à
tout prix, les multiples pressions de la part d'instances religieuses effrayées
par le sujet, toujours est-il que malgré l'indéniable qualité
visuelle et de l'interprétation, de la magnifique création
musicale par Peter Gabriel, le film déçoit. Il y a des instants
magnifique ou le Christ est en proie au doute, mais les séquences
de liaison (et politiquement correctes) de la vie "traditionnelle" de Jésus
sont un peu mièvres voire risibles (je pense aux "effets" d'apparitions
animalières dans le désert, et surtout au gore de la scène
ou Jésus arrache son propre coeur), comme si Scorsese avait voulu
faire des concessions pour que son film plaise, malgré la difficulté
du sujet, contre vents et marées. Reste que le film à eu
le mérite d'exister, grâce à la combativité
de son réalisateur, dans une période ou l'autorité
de l'Église catholique commençait son ahurissante influence
sur le monde. Il est important que ce genre de film viennent contrebalancer
l'ordre établit.
Ce film marque la fin de la première partie
de la vie du cinéaste, qui a enfin chassé ses vieux démons,
quinze ans après Mean Streets. Il peut désormais voguer vers
les sommets que seront ses films futurs, GoodFellas
et Casino.
Autour
du film
Dans le rôle de Ponce Pilate, notons la présence
de la rock star, David Bowie. Au départ, le choix s'était
d'abord porté sur Sting, autre rock star, mais celui-ci avait beaucoup
à faire avec la tournée mondiale des concerts pour Amnesty
International, dans lesquels participaient également Peter Gabriel,
le génial compositeur de la musique du film.
Le film aurait pu être une coproduction française,
grâce au système d'avance sur recette, et au soutien aux cinéastes
étrangers du ministère de la culture (dirigé par Jack
Lang). Mais, après la controverse du Je vous salue Marie
de Godard, un mouvement intégriste fit pression auprès du
gouvernement, rapporté par le cardinal Lustiger, pour interdire
l'utilisation de fonds publics pour aider le projet.